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La parabole des ouvriers de la onzième heure

La parabole des ouvriers de la onzième heure

Un ami m'a fait le grand plaisir de me donner son point de vue sur la parabole. En espérant que cela vous inspire, je vous le partage.


"Cette parabole est de prime abord difficilement acceptable car n’y a apparemment aucune justice ! Ceux qui arrivent au dernier moment et travaillent dix fois moins que les autres reçoivent en définitive le même salaire !

Est-il possible de justifier cela ?

Nous allons essayer d’étudier cela dans un premier temps sur le plan physique, c’est-à-dire du point de vue de notre réalité terrestre quotidienne, puis dans un deuxième temps, essayer de nous élever au point de vue spirituel.

1) Sur le plan physique

Les arguments en faveur d’une injustice flagrante existent effectivement. Le premier argument étant donné par les ouvriers de la parabole : « Ces derniers n’ont travaillé qu’une heure, et tu les traites à l’égal de nous, qui avons supporté la fatigue du jour et la chaleur ».

Il faut bien l’avouer, cette réaction est celle qui est, pour la plupart d’entre nous, aussi la nôtre.

Pourquoi l’autre devrait-il gagner autant que moi si j’ai fait beaucoup plus d’heures que lui, ou si… je travaille mieux que lui… j’ai plus de compétences… j’ai fait beaucoup plus d’études… j’ai plus de responsabilités… etc…

En effet, c’est un argument qui se tient et il semble à priori inattaquable.

Mais voyons cela d’un peu plus près.

La première chose à constater est que ce raisonnement n’est utilisé que lorsqu’il est question de notre travail rémunéré. Énormément de personnes sont investies dans des associations où les heures passées et le travail fourni ne se comptent pas et ne sont pas payés et là, curieusement, cette demande de « justice » et « d’égalité » n’est pas présente.

Il s’agit donc bien à la base, de l’argent que nous allons gagner. C’est-à-dire que dans notre esprit le salaire et le travail sont imbriqués et derrière le mot travail se cache toujours le mot argent.

Et ne soyons pas dupes, il faut bien reconnaître qu’il y a là-dedans une grande part d’égoïsme. Mais cela va même un peu plus loin, on le voit bien dans la parabole, ce qui dérange les ouvriers n’est même pas le salaire qu’ils ont reçu, c’était bien ce qui était convenu, mais le fait que les autres en gagnent autant.

Notre égo se compare aux autres, nous posons des exigences à nos semblables ("si tu veux gagner autant tu n’as qu’à travailler autant"), nous réclamons nos droits, mais uniquement pour nous.

Le fait d’économiser de l’argent en pouvant acheter à très bas prix des vêtements fabriqués pour des salaires de misère dans les pays du Tiers-monde ou des appareils électroniques sophistiqués, contenant du cobalt extrait par des enfants dans des mines d’Afrique et là encore fabriqués dans des pays où la main-d’œuvre est bon marché, cela ne nous révolte pas puisque nous pouvons en profiter.

Malheureusement, même si nous n’en n’avons pas la conscience, cet égoïsme est à l’origine des misères et des privations terribles vécues aujourd’hui dans le monde.

Dans la parabole, chaque ouvrier a reçu un denier, c’est-à-dire l’argent qui était nécessaire pour vivre pour une journée. Le maître de maison est bon car il va s’enquérir des ouvriers qui, vers la fin de la journée, n’ont toujours pas trouvé de travail : « Pourquoi vous tenez-vous ici toute la journée sans rien faire ? Ils lui répondirent : C’est que personne ne nous a loués. Allez aussi à ma vigne, leur dit-il ».

Ce qui importe au maître de maison est que chaque ouvrier qui attendait d’être embauché puisse avoir de quoi vivre pour la journée suivante, peu importe les heures passées.

Le fait de séparer le travail et la rémunération, qui doit servir à ce que chaque être humain puisse vivre dignement, est une des exigences les plus importantes de notre temps.

De fait, on pourrait considérer que cette parabole donnée par le Christ est, du point de vue des réalités de l’incarnation, un des fondements de la loi sociale fondamentale que Rudolf Steiner nous a donnée et dont les fruits sont les enseignements sur la tri-articulation de l’organisme social" [...]

La seconde partie ne concerne pas directement le sujet traité mais vous pouvez la consulter en cliquant sur le pdf.

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  1. Car le royaume des cieux est semblable à un maître de maison qui sortit de grand matin afin d'embaucher des ouvriers pour sa vigne.
  2. Etant convenu avec les ouvriers d'un denier par jour, il les envoya à sa vigne.
  3. Il sortit vers la troisième heure, en vit d'autres qui se tenaient sur la place sans rien faire,
  4. et leur dit: " Allez, vous aussi, à ma vigne, et je vous donnerai ce qui sera juste. "
  5. Et ils y allèrent. Il sortit encore vers la sixième et la neuvième heure, et fit la même chose.
  6. Etant sorti vers la onzième (heure), il en trouva d'autres qui stationnaient, et il leur dit: " Pourquoi stationnez-vous ici toute la journée sans rien faire? "
  7. Ils lui disent: " C'est que personne ne nous a embauchés. " Il leur dit: " Allez, vous aussi, à la vigne. "
  8. Le soir venu, le maître de la vigne dit à son intendant: " Appelle les ouvriers et paie-leur le salaire, en commençant par les derniers jusqu'aux premiers. "
  9. Ceux de la onzième heure vinrent et reçurent chacun un denier.
  10. Quand vinrent les premiers, ils pensèrent qu'ils recevraient davantage; mais ils reçurent, eux aussi, chacun un denier.
  11. En le recevant, ils murmuraient contre le maître de maison, disant:
  12. " Ces derniers n'ont travaillé qu'une heure, et tu les as traités comme nous, qui avons porté le poids du jour et la chaleur. "
  13. Mais lui, s'adressant à l'un d'eux, répondit: " Ami, je ne te fais point d'injustice: n'es-tu pas convenu avec moi d'un denier?
  14. Prends ce qui te revient, et va-t'en. Je veux donner à ce dernier autant qu'à toi.
  15. Ne m'est-il pas permis de faire en mes affaires ce que je veux? Ou ton œil sera-t-il mauvais parce que, moi, je suis bon?
  16. Ainsi les derniers seront premiers, et les premiers derniers. "

Matthieu 20 : 1 – 16